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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/181

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

Que la femme considère donc, avant de recevoir le premier baiser de feu qui la marquera pour toujours, s’il n’y a pas pour elle d’autres bonheurs moins intenses mais plus sûrs, une autre manière de vivre, parmi des compagnons ordinaires qui n’ont pas eu la révélation de la volupté. Qu’elle se demande si elle pourra se mettre au-dessus de toute considération de morale courante, braver les préjugés, vaincre sa conscience, triompher des autres et d’elle-même. Qu’elle sache enfin que l’idéal qu’elle poursuivra sera décevant et amer, toujours lointain, toujours irréalisé, que ce sera un idéal stérile et égoïste, un idéal pourtant.

S’il arrive qu’un homme et une femme, faits l’un pour l’autre physiquement et moralement, se rencontrent et que tous les deux aient en eux cette sorte de désorganisation des nerfs, d’appétit effréné de caresses, ils laisseront, dans la société où ils passeront unis, un dangereux sillage de perversion.

Ils se seront d’abord enivrés d’eux-mêmes, entièrement et longtemps. Mais ils s’apercevront vite que cette ivresse, même quand elle est déréglée, n’entraîne pas chez eux, comme chez les êtres entre qui il n’y a pas cette mystérieuse entente, le dégoût ou même la satiété, ou même le besoin de repos.