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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/225

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

la rue cette femme du monde dont William lui avait parlé, qui aurait craint de se compromettre en prenant un amant dans son milieu.

Il y pensait perpétuellement, il s’en faisait une image exacte, il la connaissait, il la regardait passer, très blonde, accompagnée de gens en habit, le soir, à la sortie de l’Opéra ou devant les grands restaurants. Il la chercha à Bullier, à la foire de Neuilly, où sa fantaisie et sa curiosité devaient l’amener. Il avait analysé les ressorts de sa pensée. Elle avait lu les mêmes livres que lui, elle était curieuse, un peu romanesque. Elle souffrait de la médiocrité des gens du monde, elle aspirait à connaître des artistes, des êtres libres comme lui. Il se représentait son appartement, la richesse des étoffes, la lumière électrique. Il voyait son mouchoir de dentelle dans sa main énervée, respirait son parfum, entendait crier la soie sous son pas. Son mari était au cercle, ses domestiques étaient couchés et la poésie de la nuit et de la nouveauté l’appelait au dehors.

Il ne savait pas en quel point de Paris elle était, mais, chaque soir, il se disait qu’elle était quelque part.

Elle avait descendu son escalier d’un pas furtif, elle marchait vite, enveloppée dans sa fourrure et