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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/226

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

sans avoir l’air de rien. Une femme du monde reste toujours une femme du monde. Elle pouvait passer à côté de lui sans qu’il s’en doutât. Il fallait deviner. Elle ne lui jetterait pas un regard brûlant : l’éducation est plus forte que tout. La peur de manquer son bonheur était pour Adolphe une terrible anxiété.

Il consulta plusieurs fois William.

— Mon vieux, répondait celui-ci, des aventures pareilles me sont arrivées plus de cent fois. Tu ne sais pas t’y prendre.

Adolphe pourtant faisait tout le possible.

Il vieillit dans ses recherches. Il manqua des occasions de gagner de l’argent, il rata plusieurs fois sa vie pour le regard d’une bonne, à cause du baiser promis par une fille de la rue. Dans son milieu de déclassés, d’incomplets et de chimériques, il passait pour quelqu’un de peu sérieux, de trop faible, à la merci des femmes. Il se flattait de cette faiblesse, il tirait une vanité incompréhensible du pouvoir qu’une œillade avait sur son cœur.

Il déchut encore. Don Juan mal rasé, aux souliers éculés, aux habits râpés, il n’eut plus que des conquêtes moins brillantes, des filles moins jolies, qu’il ne devait qu’à sa foi en lui-même, à la con-