Aller au contenu

Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/245

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

241
L’AMOUR ET LES POISONS

discrédit de l’opinion qui jette la pierre à la femme dont la robe en passant dégage un léger souffle d’éther.

Il faut, avec sagesse, se servir des poisons. L’amour est un poison et c’est la meilleure chose de la vie. Criminel serait celui qui voudrait le supprimer du monde ! Marié à d’autres poisons, il nous donne des joies inattendues, il a des baisers plus longs et plus doux, ses caresses sont plus savoureuses, nous descendons avec lui dans un royaume nouveau. Celui qui n’a pas goûté à cet élan vers l’inconnu, à cette vibration qui rapproche du divin, ignore tout de l’amour.

Il faut négliger les paroles que les gens sensés échangent entre eux avec gravité sur ce sujet, ne pas tenir compte du mépris dans lequel ils tiennent celui qui marche avec l’auréole louche du fumeur d’opium. Car ce sont des gens sans idéal supérieur. Ils comprendront aisément que l’on vive dans le seul but de gagner de l’argent, que pour cela on passe des jours misérables dans une boutique étroite ou dans un bureau nauséabond, ils louangeront le commerçant qui ne songe qu’à vendre davantage, le spéculateur qui n’a d’autre but que de grossir sa fortune, mais ils n’auront pas assez d’indignation pour le rêveur qui voudra,