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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/65

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

membres de la caravane et à Miette elle-même. Comme l’on avait organisé un déjeuner sur la montagne, il refusa la bouteille de champagne qu’on lui offrit. Cependant Miette s’était piquée au jeu. Deux jours après, elle faisait prévenir le guide de venir la prendre au matin, et elle partait seule avec lui.

Voici — à peu près dans les mêmes termes — comment Miette Y… conta à une de ses amies, qui me l’a rapporté, sa promenade.

« Il y avait sur la route un parfum de fougère et de terre mouillée. Il était huit heures du matin. Nos chevaux trottaient côte à côte et je me sentais une lucidité d’esprit délicieuse.

« Je ne savais pas pourquoi j’avais tenu à faire cette promenade seule avec Pierre — c’était le nom de mon guide. J’éprouvais peut-être du dépit de sa mauvaise humeur obstinée à mon égard, j’avais le désir de le dompter, de le rendre aimable, troublé. Peut-être était-ce aussi la crainte de la solitude avec lui, l’appréhension d’un vague danger.

« Il y avait déjà quelque temps que nous avions quitté Luchon et nous montions à petits pas sous d’épais marronniers, parmi des pierres, et il n’avait pas encore ouvert la bouche, si ce n’est pour répondre par monosyllabes à mes questions.