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Page:L’Auvergne historique, littéraire et artistique, série 3, tome 1, années 1893-1894, 1903.djvu/265

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produit en 1818 dans le ressort même dont dépendait le tribunal du Havre. Les mémorables incidents de son incarcération au Mont-Saint-Michel étaient d’autant moins oubliés que la mort du prince de Navarre, chanté par Béranger, venait d’en rafraîchir la mémoire. Or, chose surprenante ! entre Bruneau et Persat se rencontraient des rapprochements d’une déconcertante analogie. Si l’un avait été enlevé dans un orgue, l’autre l’avait été dans un cheval de bois ; l’abbé Rose était la photographie vivante de l’abbé Laurent ; Bruneau aussi avait été militaire ; lui aussi avait longtemps séjourné aux États-Unis en qualité de boulanger, de tailleur de pierres et de domestique ; lui aussi avait débarqué à Saint-Malo avec un passeport d’identité.|110}}

Le sort qui avait frappé l’un devait-il également atteindre l’autre ? Convenait-il au contraire de ne pas donner plus d’importance aux revendications de Persat qu’il n’en avait été donné à celles du tambour de Belgiojoso, de Dufresne de Saint-Léon, de l’huissier d’Uzès ?...

Grande était la perplexité lorsque parut dans le Constitutionnel une lettre datée de Porstmouth et signée « Maurice Persat, ex-capitaine de lanciers, décoré de la Légion d’honneur ». Notre ancienne connaissance invitait le rédacteur de la feuille parisienne à insérer dans ses colonnes un avis portant « que Victor Persat, qui s’est dit Dauphin de France aux États-Unis d’Amérique, est son légitime frère, atteint d’un coup de feu à la tête durant la campagne de Russie et qui a perdu l’esprit à la suite de sa blessure ». En même temps la famille Persat entamait à Riom une procédure en interdiction, malgré les protestations de l’intéressé auprès du juge de paix d’Ennezat et des représentants du ministère public.

Ce fut dans ces conjonctures que l’infortuné Victor comparut devant les juges correctionnels du Havre, aux audiences des 22 et 29 juillet 1825.

— « Quels sont vos noms, votre profession, vos antécédents ? Quels sont vos moyens de défense ? » lui demande le président.

Voici en substance, dégagée de sa confuse phraséologie, la réponse du prévenu :

— « En ma vie j’ai porté plusieurs noms ; sous ces noms divers, j’ai été et je suis le légitime fils de Louis XVI ; je me nomme Charles ou Philippe,