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Page:L’Auvergne historique, littéraire et artistique, série 3, tome 1, années 1893-1894, 1903.djvu/271

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se soulèverait d’indignation. Le peuple et l’armée ne pousseraient qu’un cri de vengeance.

» On verrait alors les juges attester mon innocence en rejetant la responsabilité de ma condamnation sur le ministre de la justice qui, à son tour, vendrait, comme Pilate, son roi.

» Déclarez-moi légitime ou imposteur, mais citez au moins en public les témoins que j’ai désignés ; vous sauvegarderez ainsi la responsabilité du roi et de la loi. »

La Cour de Rouen avait vraisemblablement entendu beaucoup de plaidoiries de gens d’esprit présentant moins d’apparences de logique et de gênantes insinuations. Toutefois, défiante des apparences et convaincue que l’équilibre européen résisterait à la secousse de son arrêt, elle confirma purement et simplement la sentence des premiers juges et confia à un asile d’aliénés le soin de guérir le malade ou au moins d’empêcher la maladie de se propager.

Notre héros fut donc ramené à son cabanon de Bicêtre où il demeura huit mois.

Certes, il n’y demeura pas oisif. Le manuscrit que nous feuilletons nous fournit en effet une série innombrable de lettres écrites durant cette période à d’innombrables destinataires. C’est tout d’abord une liasse compacte à l’adresse du Procureur général du ressort de Rouen, M. de Vandœuvre, dans laquelle tantôt il argue de nullité les actes de procédure qui le concernent, tantôt il offre des révélations sur un assassinat dont il a dénoué la trame, tantôt il demande à être transféré dans le département du Puy-de-Dôme.

« Pourquoi, indique-t-il dans une de ces dernières, datée de Rouen l’an de grâce de mon règne le trente-quatrième, pourquoi refuse-t-on de me transférer en Auvergne ? – C’est, me direz-vous, parce qu’il faut d’abord que je renonce à mes prétentions. – La différence qu’il y a entre vos procédés et ceux des bandits de grand chemin réside en ce que les uns exercent leurs violences dans les forêts, tandis que vous foulez impunément les lois en public et cachez sous votre robe de juge les crimes que vous commettez. »

D’autres épîtres sont à l’adresse du baron de Vançay, Préfet de la Seine-Inférieure, auquel il dénonce le silence étrange que le Procureur général oppose à ses réclamations, et qu’il fixe sur la nature de ses intentions :