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Page:L’Héritier de Villandon - L’Avare puni, 1734.djvu/23

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L’AVARE PUNI.

Ne peuvent concevoir qu’on puisse aimer jamais
D’une tendresse délicate.
Il prétend cette nuit que sa vengeance éclate,
Et croit y réussir, gagnant heureusement
Le jardin où donnoit plus d’un appartement.
Il faisoit un beau clair de lune,
Tems peu propre à bonne fortune.
Ainsi comme il portoit ses pas
Devers un appartement bas,
La Suivante le vit paroître
Justement dessous la fenêtre.
Le reconnoissant bien, elle ne manqua pas
De juger par quelle avanture
On voyoit sa sotte figure ;
Et comme en cas pareil elle avoit de l’esprit
Plus qu’un Lutin, à ce qu’on dit,
Elle conçut à l’heure même
Dans sa cervelle un stratagême
Propre à berner ce vieux Jaloux,
Et propre à disculper son aimable Maitresse,
Dont la gloire toujours fortement l’intéresse ;
Enfin bon à tromper le plus rusé des foux.
Ayant donc vû, sans en être apperçuë,
Que le vieux Coquin s’approchoit
Des fenêtres, tant qu’il pouvoit,
Au moment qu’elle crut pouvoir être entenduë,
Elle se mit à caqueter,
Pour lui donner lieu d’écouter :
C’étoit tout ce qu’il pouvoit faire.
Dans cette Salle basse étoit de la lumiere ;
Mais les volets étoient fermez.