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Page:L’Héritier de Villandon - L’Avare puni, 1734.djvu/25

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L’AVARE PUNI.

Je vous accepterois volontiers pour époux :
Mais sans cela, point de nouvelle :
Me donner votre foi ? c’est pure bagatelle ;
Je ne voudrois pas l’accepter.
Elle se tut ; puis dit : Que venez-vous conter ?
Et bien, oüi, plus que vous je l’aime,
Il est riche, & posé, sage dans ses discours :
Ses honneurs croissent tous les jours,
Et je ne feindrai pas de vous dire à vous-même,
Qu’en dépit de son âge il auroit mes amours,
S’il m’offroit, comme vous, une bonne promesse
Qui me prouvât bien sa tendresse.
Elle se tut encor pendant quelque moment,
Et puis reprit fort brusquement :
Je ris de tels discours : hé bien, bien ! s’il est chiche,
Il deviendra toujours de plus riche en plus riche.
Je le repete encor : Que mon sort seroit doux,
Si du Seigneur Artaut j’avois sçû gagner l’ame
Jusqu’à me voir un jour sa femme !
Que je serois heureuse avec un tel époux !
Artaut presque tout pamé d’aise
Sentit l’amour plus chaud que braise
Brûler son cœur pour cet Objet charmant.
Elle (prenant toujours un ton plus véhément)
Poursuivit : Soit ; je vous pardonne
Une entreprise si friponne,
Si vous voulez, mais promptement,
Sortir d’ici si finement,
Que vous ne puissiez être apperçu de personne.
Lors marchant avec bruit, on se mit en devoir
D’ouvrir porte & fenêtre, afin, dit-on, de voir.