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Page:L’Héritier de Villandon - L’Avare puni, 1734.djvu/8

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L’AVARE PUNI.

Jadis regnoit dans la Champagne,
Par les dons de Bacchus fort renommé climat,
Et pour tout païs de Caucagne,
Un Prince dont les mœurs firent beaucoup d’éclat.
Il étoit vaillant dans la guerre,
Prudent dans son conseil, & plein de fermeté :
Mais ce qui plus encor fit bruit par toute terre,
Ce fut sa libéralité.
Affable, généreux plus d’effets qu’en paroles :
(Vertu très-peu commune aux gens de qualité,
Qui tout remplis de vanité,
Souvent n’ont qu’en discours la générosité,
Et mettent tous leurs Biens en des dépenses folles.)
Notre Heros avec soin les fuyoit,
Et suivant son grand cœur, à pleines mains versoit
Et les écus & les pistoles
Sur ceux de ses Sujets que le sort maltraitoit.
Secours des malheureux, il eut l’âme si belle,
Sa générosité fut telle,
il fut si bienfaisant, si bon,
Que de Henry le Large il reçut le surnom.
Communément la Ville, la Province
Reglent leurs mœurs sur celles de leur Prince :
Aussi les Champenois pendant son regne heureux,
Se piquant de délicatesse,
De grandeur & de politesse,
Se montroient presque tous braves & généreux ;
Entr’autre, un certain Gentilhomme
Des plus grands Seigneurs du païs,
Riche, liberal, bien appris,
S’étoit toujours fait voir vaillant & galant homme :

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