Page:L’Odyssée (traduction Bareste).djvu/25

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mort. Et ton cœur n'est pas ému, ô puissant roi de l'Olympe ! Ulysse, près des vaisseaux argiens, et sur les rivages de Troie, a-t-il jamais négligé quelques-uns de tes sacrifices ? Pourquoi donc es-tu maintenant si fort irrité contre lui, ô Jupiter ? »

Le dieu qui rassemble au loin les nuages lui dit :

« Ma fille, quelle parole s'est échappée de tes lèvres ; pourrais-je oublier le divin Ulysse dont la sagesse est supérieure à celle des autres hommes, Ulysse qui offrit toujours de pompeux sacrifices aux immortels habitants de l'Olympe ? Mais le dieu qui commande à l'élément terrestre, Neptune, est à jamais irrité contre lui depuis le jour où il priva de la vue Polyphème, égal aux dieux, qui par sa très grande force surpasse tous les Cyclopes. Ce fut la nymphe Thoosa, fille de Phorcyn, l'un des princes de la mer, qui, s'étant unie à Neptune dans les grottes profondes, donna le jour à ce géant. Depuis ce temps, le dieu qui ébranle la terre [1] n'a point fait périr Ulysse ; mais il le laisse errer loin de sa patrie. Nous tous, songeons donc aux moyens d'assurer son retour ; Neptune calmera sa colère ; car, seul et malgré nous, il ne pourra s'opposer à la volonté de tous les immortels. »

Minerve, la déesse aux yeux étincelants, lui réplique à son tour :

« Fils de Saturne, ô mon père, toi le plus puissant de l'Olympe, s'il est agréable aux dieux fortunés que le sage Ulysse revoie sa demeure, ordonne au messager Mercure de se rendre aussitôt dans l'île d'Ogygie, et d'annoncer à cette déesse à la belle chevelure que notre immuable résolution, touchant le magnanime Ulysse, est qu'il revienne dans sa patrie. Je me rendrai moi-même à Ithaque pour encourager son fils ; et j'animerai son cœur d'une force nouvelle pour qu'il convoque en assemblée les Grecs chevelus et interdise l'entrée de son palais à tous les prétendants, à eux, qui, sans cesse, égorgent ses nombreux troupeaux de bœufs à la marche

  1. Madame Dacier et Dugas Montbel ont omis les deux désignations de Neptune : γαιήσχος (qui commande à la terre) ; et ἐνοσίχθων (qui ébranle la terre) ; Bitaube ne rapporte seulement que la première. - Chez les anciens Grecs, on attribuait à Neptune les cataclysmes et les tremblements de terre.