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Ce moyen n’est point du tout la prédication des dogres chrétiens. Le christianisme, efflorescence de la philosophie hellénique[1], s’est promptement transformé, ainsi que l’avait fait dans une insondable antiquité le védisme, en une machine théocratique. Ce système est absolument antipathique au rameau de la grande famille indoue particularisé sous le nom de sémitique. La circonspection du mosaïsme dans la délimitation du rôle quasi-Egyptien abandonné à la tribu sacerdotale de Lévi, le prouve. Or, le noyau musulman est, comme le juif, arabe, c’est-à-dire sémite par excellence, et ce qui caractérise ce groupe humain est un positivisme réfractaire aux spéculations mystiques, habitude du groupe aryen, son très-proche parent cependant[2]. Jamais un Arabe ne voudra rien comprendre aux trinités, aux vierges mères, aux incarnations divines ni brahmaniques, ni égyptiennes, ni chrétiennes. non plus qu’aux transsubstantiations. Seulement, comme il est narquois et fripon, il se laissera baptiser autant de fois qu’on le voudra payer[3].

Il a été de mode, pendant un moment, de prendre texte de certains principes, de certaines coutumes remarqués dans certains groupes, plus ou moins Berbères, plus ou moins autochthones, dont les plus considérables sont connus sous l’appellation de Kabyles, pour en inférer la possibilité de retrouver là et de raviver un vieux levain de catholicisme : l’erreur est dissipée. Ces principes, ces coutumes, sont le bagage soustrait par des fugitifs aux ravageurs du littoral et il est certain que ces fugitifs, préoccupés avant tout de leur chère indépendance, ont laissé choir et se perdre en roule ce qu’ils avaient de catholicisme, tantôt orthodoxe et tantôt hérétique, suivant l’exemple donné par les Grecs ou les Romains, leurs riches et puissants Suzerains. Ils sont devenus, par le seul effet de leurs instincts sémitiques de naïf monothéisme anthropomorphique, tout aussi croyant en la mission de Mahomet que l’Arabe qui n’est pas son ami et à qui il est, au surplus, très-supérieur en industrie, en puissance de travail[4].

Non, pour influer sur les musulmans il ne faut pas s’attaquer à leurs croyances religieuses. Il faut dire à ces hommes tout aussi entêtés de leur foi héréditaire que le sont de la leur les chrétiens fervents des différentes églises : « Ce que nous vous conseillons, ce que nous vous demandons est conforme à votre propre loi » et le leur

  1. E. Havet, le Christianisme et ses Origines.
  2. L. Jacolliot, la Genèse de l’Humanité.
  3. Pellissier de Reynaud, Annales algériennes, t. III, Mémoire sur l’église d’Afrique ; édit. de 1856.
  4. Voir, entres autres, le savant ouvrage de MM. le général Hanoteau et le conseiller Letourneux : La Kabylie et les coutumes kabyles, t. 1, p. 810.