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Page:La Beaume - Le Koran analysé, 1878.djvu/22

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Il a été jugé prudent de ne s’aventurer ni dans l’océan des hadit ni dans celui des inductions, interprétations dont, en dépit de la défense du Prophète, la parole d’Allah a été l’objet de la part des docteurs musulmans, les plus abondants, les plus enfantins des ergoteurs. Il en a été du Koran comme de tout livre où l’on avait cru enfermer la sagesse humaine. Le temps marche, les fails se succèdent, les notions se multiplient, la lettre devient étroite, incomplète, contradictoire : les plus pieux d’entre les fidèles, désirant qu’elle soit constamment dans le vrai, la tordent, en font sortir ce qui leur paraît indispensable pour la maintenir à la hauteur de la réalité présente.

A plus forte raison n’a-t-on pas noté les variations que les jurisconsultes musulmans ont fail subir à la jurisprudence. Les curieux peuvent prendre pour base de leurs observations sur ce point le remarquable travail de MM. le conseiller Sautayra et Cherbonneau[1].

Moins de respect pour le texte koranique aurait permis une composition plus agréable pour le lecteur. Il serait facile d’arranger des morceaux de haute éloquence sur la charité, la tolérance, la piété, en disposant d’une certaine façon ce que Mahomet en a dit à différents moments. Les récits qu’il fait, à plusieurs reprises, et chaque fois avec des détails nouveaux, des actes des principaux personnages bibliques, pourraient, condensés, charpentés à la moderne, produire de plus saisissants effets. Un poëte trouverait des chants magnifiques en agençant ce qui est semé dans de nombreux hymmes, dans de nombreuses peintures : mais ce ne

  1. Droit musulman ; statut personnel et statut réel. Paris, 1873-1874. 2 vol.
    Voir aussi, comme se rattachant à la matière, en ce qui concerne les indigènes Israëlites, la traduction par MM. le conseiller Sautayra et le grand rabbin Charleville, de l’Eben-Haezer, 3° partie du Code rabbinique, colligé au XV siècle, par Joseph Karo, Ager, 1868-1869. 2 vol.
    Ces deux ouvrages, avec celui précité de MM. Hanoteaw et Letourneuæ et la traduction par M. le D : Perron du Précis de Jurisprudence musulmane, par Sidi-Khelil (rite matékite, celui suivi presque universellement en Algérie) renferment ce qu’il est indispensable de connaître pour raisonner pertinemment sur les conditions sociales des indigènes de l’Algérie.
    Il est regrettable que M. le Dr Perron n’ait pas encore reçu l’aide qui lui serait nécessaire pour publier en entier sa traduction de la Balance de la loi, par le cheikh El-Cheraoui. Ce vénérable cheikh égyptien, contemporain de Joseph Karo, frappé des divergences existant entre les quatre rites orthodoxes, avait entrepris de tout concilier. Il pose, pour cela, en principe que les prescriptions horaniques sont, les unes obligatoires, les autres simplement facultatives. Il n’y aurait donc qu’à s’entendre sur ce que, suivant le besoin des temps, il convient soit d’observer, soit de négliger. Un extrait de cet important travail a été publié en 1870, à Alger, chez Ed, Bastide.