Page:La Bhagavadgita, trad. de Senart, 1922.djvu/30

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entre la genèse des idées et la date des livres risque d’être décevant.

Les brâhmaṇas, très particulièrement le Çatapatha, font des allusions assez enveloppées à la métempsycose et au dogme du Karman. On a cru pouvoir en conclure que, de leur temps, ces conceptions étaient encore tout juste naissantes. Ils semblent parfois envisager les renaissances dans l’au-delà et prévoir pour les Mânes, pour ceux du moins à qui leurs mérites n’auraient pas conquis l’immortalité parmi les dieux, l’éventualité d’une mort nouvelle. On en a conclu que, de cette notion que l’on suppose primitive, (que l’on présente d’ailleurs plus précise qu’elle ne m’apparaît,) se serait lentement élaborée, par voie d’analogie ou de développement logique, toute la théorie de la transmigration. Base bien fragile et bien étroite pour une croyance qui a fait une si large fortune ! Se peut-il que, destinée à exercer sur l’esprit hindou une emprise si profonde, si irrévocable, elle soit sortie non d’un fait général, d’une orientation spontanée des imaginations, mais d’une déduction théologique ? Conçoit-on, si elle n’eût pas été solidement constituée antérieurement au Çatapaiba brâhmaṇa, à la Bṛihadâraṇyaka, à la Čhândogya upanishad, qu’elle eût pu, à l’heure ou naissait le bouddhisme, détenir l’autorité souveraine que nous lui voyons dès lors ?