Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/198

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perdre comme un fantoſme dans le ſombre de ſon cabinet ; ſe cacher au public, éviter le théatre, le laiſſer à ceux qui ne courent aucun riſque à s’y montrer, qui en ont à peine le loiſir, aux GOMONS, aux DUHAMELS.

7. — Il y a un certain nombre de jeunes magiſtrats que les grands biens & les plaiſirs ont aſſociez à quelques-uns de ceux qu’on nomme à la cour de petits-maîtres : ils les imitent, ils ſe tiennent fort au-deſſus de la gravité de la robe & ſe croient diſpenſez par leur age & par leur fortune d’eſtre ſages & modérez. Ils prennent de la cour ce qu’elle a de pire : ils s’approprient la vanité la molleſſe, l’intempérance, le libertinage, comme ſi tous ces vices leur étaient dus, et, affectant ainſi un caractère éloigné de celuy qu’ils ont à ſoutenir, ils deviennent enfin, ſelon leurs ſouhaits, des copies fidèles de tres-méchants originaux.

8. — Un homme de robe à la ville, & le meſme à la cour, ce ſont deux hommes. Revenu chez ſoy, il reprend ſes mœurs, ſa taille & ſon viſage, qu’il y avoit laiſſez : il n’eſt plus ni ſi embarraſſé, ni ſi honneſte.

9. — Les Criſpins ſe cotiſent & raſſemblent dans leur famille juſques à ſix chevaux pour allonger un équipage, qui, avec un eſſaim de gens de livrées, où ils ont fourni chacun leur part, les foit triompher au Cours ou à Vincennes, & aller de pair avec les nouvelles mariées, avec Jaſon, qui ſe ruine, & avec Thraſon, qui veut ſe marier, & qui a conſigné.

10. — J’entends dire des Sannions : « Meſme nom meſmes armes, la branche aînée, » la branche cadette, les cadets de la ſeconde branche, ceux-là portent les armes pleines, ceux-ci briſent