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croisade contre les albigeois.

XXIV.

« Seigneurs, » dit le comte, « apprêtez-vous tous ; [550] allez prendre les armes, montez à cheval, tous ensemble lancez-vous à la fois sur l’ost. — Par foi ! » dit Peire Rogier de Cabaret[1], « par mon conseil vous ne sortirez pas : si vous gardez la ville, je crois que vous ferez assez. [555] Au matin, après avoir dîné, les Français s’avanceront jusqu’auprès de vos fossés : ils voudront vous enlever l’eau dont vous vous abreuvez tous : alors qu’il y ait force coups frappés et donnés ! » À ce conseil s’accordent tous les plus sages : [560] ils font faire au dehors le guet par des chevaliers armés tout à l’entour de la ville, qui est forte ; car Charles l’empereur, le fort roi couronné, la tint plus de sept ans, à ce qu’on dit, assiégée, sans la pouvoir conquérir été ni hiver. Les tours s’inclinèrent devant lui, lorsqu’il s’en fut allé, [565] de façon qu’ensuite il la prit quand il y fut retourné. Si la geste ne ment, ce fut vérité, car autrement il ne l’eût point prise[2].

XXV.

Le vicomte de Béziers s’est bien gardé toute la nuit ; le matin au poindre de l’aube il s’est levé. [570] Les barons de France, quand ils eurent dîné, se sont tous

  1. Ce personnage ne paraît que dans la première partie de la guerre. Il était en 1204 (Doat LXII, 9) viguier de Carcassonne. — Sa femme, Brunessen, protégea Raimon de Miraval ; voir la vie de ce troubadour, Parnasse occitanien, p. 225.
  2. Voy. sur cette légende, G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, p. 254-6.