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croisade contre les albigeois.

CLXXV.

Si Dieu ne leur vient en aide et ne leur apporte un secours complet, ils sont arrivés au piége et à l’endroit fatal ; car le comte et l’évêque ont un projet caché [5285] pour abaisser Prix et Parage. Et lorsque le jour brille et apparaît dans sa splendeur, l’évêque est sorti pour se rendre à la réunion ; chevaliers et bourgeois et les principaux hommes y vinrent de la ville et se rendent à la guette, [5290] et l’évêque et l’abbé, le prévôt, le prieur et maître Robert se tenaient au devant d’eux. L’évêque commence à parler avec douceur ; il sermonne en poussant des soupirs, la larme à l’œil : « Seigneurs, » dit-il, « j’ai grande douleur au cœur, [5295] lorsque je vous vois agités et excités. Je prie Jésus-Christ, l’adorant du fond du cœur, de jeter hors de vous la mauvaise sève et la mauvaise humeur, de vous donner bonne volonté et de vous ramener à la raison, de façon qu’entre vous et le comte règne bon amour. [5300] Et puisque Dieu m’a élu maître et docteur, qu’il m’a donné comme pasteur à ses ouailles, pourvu qu’elles me veuillent croire et ne se détournent pas de moi, je les défendrai du loup et du mauvais ravisseur, puis je leur ferai paître des herbes de bonne odeur, [5305] et elles conquerront Dieu et la gloire suprême. Si j’en perdais une ou la rejetais, quand j’aurais à rendre mes comptes au saint maître, le meilleur avocat ne l’empêcherait pas de me la faire chercher, et je ne saurais où. [5310] Celui qui agite l’arbre et en fait perdre la fleur est sûr de ne point récolter de