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Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 1.djvu/168

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FABLES CHOISIES.

Mais sur tous certain[1] Grec renchérit et se pique
D’une élegance laconique.
Il renferme toûjours son conte en quatre Vers ;
Bien ou mal, je le laisse à juger aux experts.
Voyons-le avec Esope en un sujet semblable.
L’un ameine un Chasseur, l’autre un Pâtre en sa Fable.
J’ay suivy leur projet quant à l’évenement,
Y cousant en chemin quelque trait seulement.
Voicy comme à peu prés Esope le raconte.


Un Pâtre à ses Brebis trouvant quelque méconte,
Voulut à toute force attraper le Larron.
Il s’en va prés d’un antre, et tend à l’environ
Des laqs à prendre Loups, soupçonnant cette engeance.
Avant que partir de ces lieux,
Si tu fais, disoit-il, ô Monarque des Dieux, .
Que le drosle à ces laqs se prenne en ma presence.
Et que je gouste ce plaisir,.
Parmy vingt Veaux je veux choisir
Le plus gras, et t’en faire offrande.
A ces mots sort de l’antre un Lion grand et fort.
Le Pâtre se tapit, et dit à demy mort,
Que l’homme ne sçait guere, helas ! ce qu’il demande !
Pour trouver le Larron qui détruit mon troupeau.
Et le voir en ces laqs pris avant que je parte,
O Monarque des Dieux, je t’ay promis un Veau ;
Je te promets un Bœuf si tu fais qu’il s’écarte.
C’est ainsi que l’a dit le principal Auteur :
Passons à son imitateur.



Un Fanfaron amateur de la chasse.
Venant de perdre un Chien de bonne race,
Qu’il soupçonnoit dans le corps d’un Lion,
Vid un Berger. Enseigne-moy de grace

  1. Gabrias (note de La Fontaine).