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LIVRE SIXIÉME.

De mon voleur, luy dit-il la maison ;
Que de ce pas je me fasse raison.
Le Berger dit, C’est vers cette montagne.
En luy payant de tribut un Mouton
Par chaque mois, j’erre dans la campagne
Comme il me plaist, et je suis en repos.
Dans le moment qu’ils tenoient ces propos,
Le Lion sort, et vient d’un pas agile.
Le Fanfaron aussi-tost d’esquiver.
O Jupiter, montre-moy quelque azile,
S’écria-t-il, qui me puisse sauver.

La vraye épreuve de[1] courage
N’est que dans le danger que l’on touche du doigt.
Tel le cherchoit, dit-il, qui changeant de langage
S’enfuit aussi-tost qu’il le void.




III.
PHŒBUS ET BORÉE.



Borée et le Soleil virent un voyageur
Qui s’estoit muny par bon-heur
Contre le mauvais temps. (On entroit dans l’Automne,
Quand la précaution aux voyageurs est bonne :
Il pleut ; le Soleil luit ; et l’écharpe d’Iris
Rend ceux qui sortent avertis
Qu’en ces mois le manteau leur est fort necessaire.
Les Latins les nommoient douteux pour cette affaire.
Nostre homme s’estoit donc à la pluye attendu.
Bon manteau bien doublé ; bonne étoffe bien forte.
Celuy-cy, dit le Vent, prétend avoir pourveu

  1. Du dans les éditions de 1668 et de 1669.