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LIVRE NEUVIÉME.

Par sa propre et pure folie,
Il se lança dedans. Ce fut mal raisonné ;
Ce Cierge ne sçavoit grain de Philosophie.
Tout en tout est divers ; ostez-vous de l’esprit
Qu’aucun estre ait esté composé sur le vostre.
L’Empedocle de Cire au brasier se fondit :
Il n’estoit pas plus fou que l’autre.




XIII.
JUPITER ET LE PASSAGER.



O combien le peril enrichiroit les Dieux,
Si nous nous souvenions des vœux qu’il nous fait faire !
Mais le peril passé l’on ne se souvient guere
De ce qu’on a promis aux Cieux ;
On compte seulement ce qu’on doit à la terre.
Jupiter, dit l’impie, est un bon creancier ;
Il ne se sert jamais d’Huissier.
Eh qu’est-ce donc que le tonnerre ?
Comment appeliez-vous ces avertissemens ?
Un Passager pendant l’orage
Avoit voüé cent Bœufs au vainqueur des Titans.
Il n’en avoit pas un : voüer cent Elephans.
N’auroit pas coûté davantage.
Il brûla quelques os quand il fut au rivage.
Au nez de Jupiter la fumée en monta.
Sire Jupin, dit-il, pren mon vœu ; le voila :
C’est un parfum de Bœuf que ta grandeur respire.
La fumée est ta part ; je ne te dois plus rien.
Jupiter fit semblant de rire ;
Mais apres quelques jours le Dieu l’attrapa bien,
Envoyant un songe luy dire,
Qu’un tel tresor estoit en tel lieu ; L’homme au vœu