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DEUXIESME PARTIE.

Aller massacrer ces cagots ;
L’autre dit qu’il faut de fagots
Les entourer dans leur repaire,
Et brûler gens et Monastere.
Tel veut qu'ils soient à l’eau jettez
Dedans leur frocs empaquetez ;
Afin que cette pepiniere[1],
Flottant ainsi sur la riviere,
S’en aille apprendre à l’Univers
Comment on traite les pervers[2].
Tel invente un autre supplice,
Et chacun selon son caprice ;
Bref, tous conclurent à la mort :
L'avis du feu fut le plus fort.
On court au Couvent tout à l'heure :
Mais par respect de la demeure,
L’Arrest ailleurs s’executa ;
Un Bourgeois sa grange presta.
La penaille, ensemble enfermée,
Fut en peu d’heures consumée,
Les maris sautans à l'entour,
Et dansans au son du tambour.
Rien n'échappa de leur colere,
Ny Moinillon, ny beat Pere.
Robes, manteaux, et cocluchons[3],
Tout fut brûlé comme cochons.
Tous perirenf dedans les flammes.
Je ne sçay ce qu’on fit des femmes.
Pour le pauvre Frere Girard,
Il avoit eu son fait à part.


La Fontaine -- II

  1. Edition de 1668 :
    Afin que la Gent cordeliere.
  2. Ces quatre derniers vers sont supprimés dans l’édition de 168?5.
  3. Editions de 1668 et de 1685 :
    Robes, Manteaux et Capuchons.