LIVRE PREMIER. .. 3 5 Ariste ; je vous veux prouver que la pti est le mouvement le plus agreable de tous. Vostre erreur provient de ce que vous confondez ce mouvement avec la douleur. Je crains celle-cy encore plus que vous ne faites : q.uant & l’autre, c’est un phisiv, et t.rsgrand. plmsir. En voicy quelques raisons necessares, et qm vous’ prouveront par consequent que la chose est telle que je vous dis. La piti est un mouvement charitable et genereux, une lendresse de cœur dont tout le monde se sgait bon gr. Y a-r-il quelqu’un qui veiiille passer pour un hornroe dur et impenetrable 3. ses traits ? Or, qu’on ne fasse les choses lofables avec un trs-granl plaisir, e m’en Japporte 3. la satisfaction interieure des gens de bien ; le m’en rapporte 3. vous roesroe, et vous demande si c’est une chose lobable que de fire. Asseurment ce n’en est pas une, non p us que de boire et de manger. ou de prendr quel 2 ’ clue phisir clui ne regarde clue ’nostre interest. Voi’la donddja uh plaisir qui se ’encontre en la Tragedies et qm ne se rencontre pas en la Comedie. Je vous en puis alleguer beaucoup d’autres. Le’ principal, 3. mort sens, c’est clue nous nous mettons au dessus des Roys par la titi que nous avons d’eux, et devenons Dieux 3. leur [gard, contemplans d’un lieu tranqu.ille leurs embarras leurs afflictions, leurs real heurs, ny lPlUs ny moins que les Dieux considerent de I’01ympe es miserables mortels. La Tragedie a encore cela au-dessus de la Comedie, que-le Stile dont elle se sert est’sublime ; et les beautez du sublime, si nous en croyons Longin et ta veritY, sont bien plus grandes et ont tout un autfe effet que celles dtt nlediocre. Elles enlevent l’ame e’t se font-sentir/t t, out le monde avec la s0udainet des clairs. Les traits comiques, tout beaux qu’ils sont, n’ont ny la douceur de ce charme ny sa puissance. I1 est de cecy c0mme d’une Beaut excellente, et d’une autre qui a des graces : ceIIe-cy plaist, rnais I’autre rayit. Voila proprement la difference que l’on doit mettr e entre la Pirie. et le.. Rite.
Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 3.djvu/89
Apparence