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Page:La Grande Revue, Vol 51, 1908.djvu/774

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jusqu’ici les nations européennes étaient surtout dirigées par l’idéal chrétien, si dans ces dernières années de nombreux individus ont pu hésiter entre cet idéal chrétien et les enseignements de la science, il faudra désormais vivre selon une loi nouvelle, supérieure à la religion comme à la science. Cette loi, Ellen Key la trouve formulée ou tout au moins pressentie par deux grands penseurs Spinoza et Goethe. Tous deux se sont affranchis des conceptions dualistes chrétiennes pour donner une interprétation moniste de l’univers, faisant disparaître l’opposition stérile et déprimante entre la nature et Dieu, l’âme et le corps. Tous deux ont proclamé « que le but de la vie, était la vie », qu’il nous fallait donc concentrer sur elle toute notre attention et rechercher tout ce qui pouvait la rendre meilleure, plus vaste et plus harmonieuse. Gathe, devinant grâce à son génie les théories modernes de l’évolution, nous a donné l’exemple de l’individu conscient de lui-même, agissant toujours dans le sens de sa personnalité et s’efforçant « d’élever toujours plus haut la pyramide de son existence ». Voilà le chemin dans lequel il faut s’engager. Voilà quelle doit être notre nouvelle religion. Ce sera et c’est le titre du plus récent ouvrage d’Ellen Key — la Religion de la Vie. La vie doit être notre première préoccupation. Nous devons sans cesse accroître en tous sens notre activité vitale. Nous devons concevoir et apprendre l’art de vivre. Nous devons sans cesse chercher à atteindre le bonheur, qui en dernière analyse est la loi suprême de toute la nature et de tous les êtres. Non pas le bonheur au sens vulgaire du mot, c’est-à-dire la satisfaction. des désirs et instincts les plus bas. Mais le bonheur idéal et complet « où l’âme et les sens » ont leur part ; où toutes les forces de notre personnalité agissent ; où nous sommes délivrés de la brutalité sauvage mais aussi de la pusillanimité que nous imposent les conventions sociales ; où notre personnalité peut se développer, s’ennoblir et concourir ainsi à la prospérité et au bonheur de toute la race humaine.

VIII

S’il fallait apprécier les théories d’Ellen Key d’un point de vue strictement philosophique, il serait difficile de leur reconnaître une haute valeur. Les idées directrices en appartiennent à d’au-