Aller au contenu

Page:La Guette - Mémoires, 1856.djvu/163

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
111
de Mme de La Guette.

ecclésiastique du lieu qui venoit voir le désordre. Ou lui remit en main les saintes hosties pour les porter à la Varenne de Saint-Maur, où il y avoit quantité de malades.

Quelques jours après, M. le maréchal de Turenne décampa glorieusement à la barbe des Lorrains et passa la petite rivière d’Yerre sur un pont qu’il y fit jeter, et alla gagner Corbeil pour passer la Seine[1]. Les Lorrains furent heureux de trousser bagage pour passer en Flandre ; et je crois qu’ils doublèrent un peu le pas, car tous les mauvais François commençoient à reconnoître leur faute ; ce qui faisoit que les Lorrains avoient lieu de craindre qu’on ne courût sur eux.

Tous nos sauvegardes s’en allèrent aussi, et celui à qui j’avois tant d’obligation (j’entends mon Italien) vint prendre congé de moi, me disant qu’il se tenoit le plus heureux des hommes d’avoir eu l’honneur de servir une dame qui le méritoit si bien. Je repartis à cette civilité comme je devois et le remerciai un million de fois de tous les bons offices qu’il m’avoit rendus. Je lui présentai en même temps une fort belle bourse où il y avoit quarante pistolets[2]. C’étoit peu de chose en comparaison de ce qu’il avoit fait pour moi ; car sans lui je courois risque de la vie, et peut-être de l’hon-

  1. Turenne décampa le 26 septembre. Il passa la Seine à Ablon, ou il avoit un pont de bateaux, et non la petite rivière d’Yerre, qu’il n’avoit d’ailleurs pas besoin de traverser pour aller à Corbeil.
  2. Demi-pistoles.