Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/27

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philosophique de Laharpe dut embrasser chaudement le parti nombreux qui demandait la suppression des abus. Il ne sortit pas d’abord de sa carrière, et la démarche la plus éclatante qu’il fit, ce fut de présenter, à la tête des auteurs dramatiques, une adresse à l’assemblée nationale, pour la prier de rendre le théâtre libre, et assurer les droits de propriété des auteurs. Les comédiens du roi, ne songeant qu’à leurs intérêts, firent une contre-pétition ; mais Laharpe réfuta leur faible réplique, et plus tard la force des choses amena les changemens que les gens de lettres avaient sollicités. Prenant un intérêt plus vif aux événemens publics à mesure qu’ils gagnaient plus d’importance, Laharpe adopta le langage des hommes exagérés de ce temps. On connaît les vers ridicules qu’il débita dans la chaire du Lycée à l’occasion du manifeste du duc de Brunswick :

Le fer ! il boit le sang : le sang nourrit la rage,
Et la rage donne la mort.

Malgré les preuves et le soin qu’il eut de s’affubler du bonnet rouge, il ne put échapper aux soupçons et à la persécution des démagogues ; il fut enfermé dans la prison du Luxembourg, et si le règne sanguinaire de Robespierre eût continué, peut-être aurait-il partagé le sort de tant de malheureuses victimes de ce dictateur lâchement cruel. Ce fut pendant cette captivité que Laharpe, avec la promptitude des esprits vifs et exagérés, passa d’un sentiment au sentiment opposé ; peut-être aussi la crainte de la mort ébranla-t-elle les fibres de son cerveau. L’auteur de Mélanie et des Brames,