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onze pieds et demi de longueur. Roberts et ses compagnons jugèrent qu’il ne devait pas peser moins de trois cents livres. Après l’avoir cru mort sur le tillac, ils lui virent recommencer ses mouvemens avec tant de furie, qu’ils ne purent les arrêter qu’en lui coupant une grande partie de la queue, ou réside sa principale force. Ils lui trouvèrent dans le ventre cinq petits qui n’avaient encore que la grosseur d’un merlan. Roberts, faisant aussitôt du feu avec son fusil, seule arme qu’on lui avait laissée, se servit d’eau de mer pour faire cuire quelque partie de sa pêche, dont il fit un repas qui lui parut délicieux. Comme il manquait de sel pour conserver le reste, il le coupa en longues tranches qu’il fit sécher au soleil. Son fusil lui devint un meuble fort utile, parce qu’on ne lui avait laissé aucun instrument pour allumer du feu. Étant aussi sans chandelle, il se servait pendant la nuit d’un charbon ardent pour observer l’aiguille aimantée, et régler ainsi sa course.

Le 17, Roberts, n’étant qu’à huit lieues de Saint-Antoine, crut pouvoir user de son eau fraîche avec un peu moins d’épargne. Il fit cuire quelques tranches de son poisson avec du riz. Le lendemain au matinal découvrit clairement Saint-Antoine, Saint-Vincent, Sainte-Lucie, Terra-Branca et Monte-Guarde, qui est la plus haute montagne de l’île Saint-Nicolas. Elle se fait voir de tous les côtés de l’île, dans la forme d’un pain de sucre, dont