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lui protestèrent que, le vent étant contraire, il se passerait au moins quinze jours avant qu’il pût remonter au long de la côte. Cette objection l’ayant emporté sur ses désirs, il mit à la voile avec les Nègres pour aller au-devant de Potter. Mais le vent souffla si fort, qu’il fut obligé de relâcher dans un lieu qui se nomme Porto-Gary ; et voulant tenter un nouvel effort, sa grande voile fut si maltraitée, que les Nègres parlèrent de l’abandonner pour rentrer dans leur barque. Il employa toutes sortes de motifs pour leur faire perdre cette pensée. Il leur représenta, d’un côté, qu’il y aurait de la barbarie à le laisser sans secours ; et de l’autre, qu’ils allaient s’exposer encore plus follement à la fureur des flots, dans une barque beaucoup plus fragile que son bâtiment. Il ne put les persuader. Leur réponse fut qu’ils ne voyaient pas plus de danger dans leur barque que dans un vaisseau sans voiles, sans eau et sans provisions ; ou que, s’il fallait périr, ils aimaient mieux que ce fût à la vue de leur demeure que dans des lieux éloignés. Un d’entre eux ajouta que Roberts était sûr de ne manquer de rien lorsqu’il toucherait à quelque autre terre ; au lieu que la seule sûreté qu’il y avait pour eux était d’y tomber dans l’esclavage. Ils le quittèrent malgré ses plaintes et ses reproches. Le vent continuant avec beaucoup de furie, il demeura incertain de quel côté il devait se porter. Sa situation ne lui laissait guère d’espérance de pouvoir