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à couvert des invasions. Il est arrosé par le Toktotay, grande rivière fort large, mais peu profonde. Grueber rencontra sur le bord des rivières des habitations de Kalmouks. Il entra ensuite dans le Reting, province du royaume de Baranlota (Thibet), et peu après, arriva à Lassa, qui en est la capitale. Son voyage depuis Si-ning-oeï avait duré trois mois. Le roi de Thibet, qui porte le titre de deva, descend d’une ancienne famille de Kalmouks de Tangout. Le grand-prêtre du pays est adoré comme un dieu. Il n’est donc pas surprenant qu’il ait mis des obstacles à l’essor du zèle des deux jésuites. Ils racontent que, sans les empêchemens qu’il leur opposa, ils auraient converti un grand nombre d’habitans. Au reste, quoiqu’il impose la peine de mort à quiconque lui refuse son adoration, ils furent traités fort humainement par le peuple, et par le roi lui-même, qui était frère du grand-pontife, durant leur séjour à Lassa, qui dura deux mois.

De Lassa, les deux missionnaires se rendirent en deux jours au pied de la montagne de Langour, qui est d’une hauteur extraordinaire : l’air y est si subtil au sommet, qu’à peine y peut-on respirer. Les rochers et les précipices rendent le passage impossible aux voitures, et l’on est obligé de marcher à pied l’espace d’un mois jusqu’à Kouti, ville sur la frontière du Népal. Cette chaîne de montagnes est remplie de sources froides et chaudes ; aussi le poisson et les pâturages y sont-ils en abondance.