Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 11.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le chaud artificiel n’est pas moins extraordinaire en Sibérie que le froid naturel. Rien de plus insupportable que la manière dont on s’y chauffe. Dans toutes les maisons, l’appartement de la famille est chauffé par un poêle de brique fait en forme de four, mais plat. On pratique en haut un trou d’environ six pouces, qui s’ouvre et se ferme au moyen d’une soupape. On allume le poêle à sept heures du matin. Comme la soupape est fermée, l’appartement se remplit d’une fumée qui s’élève à deux ou trois pieds au-dessus du plancher, où l’on reste assis ou couché, de peur d'étouffer dans l’atmosphère de cette vapeur brûlante. Au bout de trois heures, que le bois du poêle est consumé, on ouvre la soupape, et la fumée, se dissipant, ne laisse qu’une forte chaleur qui se soutient jusqu’au lendemain par le défaut de communication avec l’air extérieur. La température de l’air intérieur est telle, que le thermomètre de Réaumur y monte le matin à 36 et 40 degrés, et s’y soutient dans la journée jusqu’à 16 et 18 au-dessus de zéro.

Chappe, qui plaint le sort des Sibériens, également tourmentés par le froid qu’ils souffrent et par la manière dont ils s’en défendent, déplore plus fortement encore leur superstition qui augmente la misère de leur climat par des jeûnes et des pratiques funestes. Les lampes et les bougies qu’ils allument à toutes leurs chapelles intérieures, et qu’ils laissent brûler toute la nuit sans précaution, occasionent de