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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 11.djvu/265

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Lestoc cultivait le jardin, portait l’eau, faisait le pain, la bière et le blanchissage. Quelquefois ces prisonniers voyaient du monde.

Enfin, après quatorze ans d’exil, Lestoc et sa femme furent rappelés par Pierre III. Le comte de Lestoc, plus que septuagénaire, rentre à Pétersbourg en habits de moujic, c’est-à-dire de paysan, fait communément de peau de mouton. Il y est accueilli et visité par tous les seigneurs de la cour, et par les étrangers. Comme il parlait librement de son exil, sans en accuser pourtant la mémoire d’Élisabeth, ses amis l’avertirent qu’il déplaisait à la cour, et qu’il s’exposait à de nouvelles disgrâces. Soit qu’il craignît l’effet de ces menaces, soit par une suite de l’esprit de liberté qu’il n’avait pas perdu dans sa prison, un jour que Pierre III l’avait admis à sa table : « Mes ennemis, dit Lestoc à l’empereur, ne manqueront pas de me rendre de mauvais offices ; mais j’espère de votre majesté qu’elle laissera radoter et mourir tranquillement un vieillard qui n’a plus que quelques jours à vivre. »

Dans le nord de la Russie, c’est le climat qui s’oppose à la population par la stérilité des terres, qui est le plus insurmontable de tous les obstacles. Dans le midi, c’est un concours de causes physiques et morales qui dépeuple le pays. Les conquêtes de Gengis-khan et de ses successeurs l’ont dévastée. Les émigrations continuelles des Tartares en font un désert. La petite vérole moissonne près de la