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temps après retira de ses mains ces misérables victimes, et les fit conduire avec toutes sortes de bons traitemens à Iakoutsk. De là ces deux Japonais allèrent, sous la protection du gouvernement, à Tobolsk, puis à Moscou et à Pétersbourg. C’est là qu’ils furent présentés à la cour en 1731. On les fit élever dans une école militaire, où ils reçurent le baptême en 1734. Deux ans après, on les mit avec de jeunes Russes pour apprendre la langue du pays, et communiquer la leur ; mais cette même année, le plus âgé, qui avait quarante-trois ans, périt, après six ans d’exil, dans un climat trop étranger à celui de sa naissance. Le plus jeune mourut trois ans après, le 15 décembre 1739. L’Académie de Pétersbourg, qui avait été chargée de leur éducation, les fit modeler en plâtre, et conserva ce monument singulier dans le cabinet des curiosités, où on le voit aujourd’hui.

Malgré toutes les précautions des souverains de la Russie pour adoucir le joug des Kamtchadales, les Cosaques exercèrent sur ce peuple vaincu toutes les vexations qui suivent la conquête. Comme ils n’avaient point amené de femmes avec eux, ils abusèrent de la force pour en avoir. Lorsqu’ils avaient assujetti quelques ostrogs, ils prenaient un certain nombre de femmes et d’enfans, qu’ils partageaient entre eux. Ils vivaient avec une de ces femmes en concubinage, et quand ils en avaient eu des enfans, ils lui donnaient l’inspection sur les