Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/25

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« Il leur fallait traverser de vastes déserts où règnent souvent des ouragans affreux. Alors, obligés de séjourner, ils consommaient bientôt leurs provisions, et se trouvaient réduits à manger leurs sacoches de cuir, leurs courroies et leurs chaussures, et surtout leurs semelles, qu’ils faisaient rôtir. Il paraît presque incroyable, dit Kracheninnikov, qu’un homme puisse vivre dix à douze jours sans manger ; c’est pourtant une chose qui ne surprend personne dans ce pays, puisque parmi ceux qui ont fait ce voyage, il y en a peu qui n’aient été exposés à cette cruelle extrémité. »

Cet auteur indique ensuite trois routes qui menaient autrefois d’Iakoutsk au Kamtchatka. La première allait par le Léna, dans la mer Glaciale, d’où l’on entrait dans les rivières d’Indigirka ou de Kovima. De là, par terre, on allait gagner la mer de Pengina, ou l’Olioutore, qu’on côtoyait en canot ou à pied. Mais cette route, qui faisait parcourir douze cents lieues au lieu de six cents, était sujette à de grands inconvéniens ; car dans la belle saison, où les glaces sont fondues, il ne fallait pas moins d’un an pour ce trajet, même avec un vent favorable ; et si le temps était contraire, les glaces pouvaient briser les bâtîmens, et l’on était trois ans à faire cette route. On l’a donc abandonnée.

La seconde route, par terre, menait à Anadirskoi. On traversait six à sept zimovies ou habitations d’hiver, pour y lever environ deux mille six cent quatre-vingt-trois zibelines, et