Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/28

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estropient. Plus les montagnes sont hautes, plus elles sont remplies de boue. On trouve sur leur sommet des marais énormes, et des endroits couverts d’une terre mouvante. Si un cheval de somme s’y enfonce, il n’y a nul moyen de l’en tirer ; et quand on marche, on ne peut voir qu’avec la plus grande horreur la terre se mouvoir, comme les vagues, dix sagènes autour de soi. »

Ainsi, malgré tous les périls de la mer, les voyages de terre sont encore plus rebutans par la longueur des routes, la difficulté des chemins, l’incommodité des transports, surtout dans ce pays désert, où la terre, qui paraît à peine sortir du sein des mers, conserve encore le limon et la vase dont elle fut détrempée. Les rivières sans nombre qui tiennent ce pays dans une sorte d’immersion, attendent la main de l’homme pour recevoir des lois et des barrières dans leur cours, pour rendre habitable et fécond le sol qu’elles inondent.

Cependant Kracheninnikov, qui avait fait la partie la plus longue et la plus désagréable de son voyage, avait encore d’autres périls à essuyer avant d’arriver au terme. Il attendit près de deux mois à Okhotsk qu’un vaisseau venu du Kamtchatka fût radoubé, pour y retourner. Enfin ce bâtiment fut prêt et chargé, et l’on partit le 4 octobre. Laissons parler l’auteur jusqu’à la fin de son voyage.

« Nous sortîmes, dit-il, à deux heures après midi, de l’embouchure de la rivière Okhota,