Les Mexicains célébrèrent leur victoire avec des transports de joie ; tous les quartiers de la ville furent éclairés pendant la nuit par de grands feux ; on entendit le son des instrumens militaires qui se répondaient en différens chœurs ; et les temples jetant un éclat particulier qui paraissait accompagner quelque cérémonie barbare, on ne douta point que cet appareil ne regardât les prisonniers espagnols, et qu’ils ne fussent sacrifiés cette nuit aux dieux de l’empire. Quelques soldats qui s’avancèrent vers le quai dans des canots crurent entendre les cris de ces malheureuses victimes, et reconnaître même ceux qui les poussaient. Leur imagination en fut frappée, et Cortez ne put entendre leur récit sans verser des larmes.
Guatimozin mit alors en œuvre un artifice qui produisit un grand effet sur le peuple ; il fit courir le bruit que Cortez avait été tué dans sa retraite ; et cette idée inspira un nouveau courage aux Mexicains, qui conçurent l’espérance de se voir promptement délivrés. Les têtes des Espagnols sacrifiés furent envoyées dans toutes les villes voisines comme des témoignages sensibles d’une victoire qui devait les ramener à l’obéissance. Enfin, pour confirmer ces heureux présages, on publia que le dieu des armes, principale idole du Mexique, adouci par le sang des victimes espagnoles, avait annoncé à l’empereur, d’une voix intelligible, que la guerre finirait dans huit jours,