Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 21.djvu/120

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nissaient les horreurs de leur climat qui les défendait de l’inhumanité des avides Européens ; car tous les fléaux de la nature ne révoltent pas le cœur humain comme les injures de l’homme. Ces sauvages, heureux sous le joug volontaire de la religion, trouvaient les tempêtes, les glaces, la disette et la famine, douces et légères au prix de la servitude personnelle, des travaux forcés et des outrages de toute espèce auxquels la race des hommes blancs a soumis celle des hommes noirs. De l’Afrique on transportait l’attention des nouveaux chrétiens sur l’Amérique, où les herrnhuters avaient aussi des frères et des sœurs. Quand on lut aux Groënlandais la perte de la congrégation de Gnadenhutten en Pensylvanie, ils en furent touchés jusqu’aux larmes. Cette catastrophe avait consumé dans les flammes quelques herrnhuters européens des deux sexes : mais les sauvages américains n’avaient perdu que leurs effets et s’étaient sauvés à Bethléem, où la commisération leur fit trouver des ressources pour le vêtement et la nourriture. La religion, qui dans des temps de ferveur étend et resserre les liens de l’humanité, fit la même impression de charité sur les Groënlandais que sur les Pensylvains. Ceux-là voulaient tous contribuer au soulagement de leurs frères de l’Amérique. « L’un dit, J’ai une belle peau de renne que je donnerai ; l’autre, J’ai une paire de bottes neuves que je veux envoyer ; un autre, Il faut que je donne un phoque pour la nourriture et le