Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/101

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vêtus que ceux que nous avions vus auparavant ; mais les enfans étaient entièrement nus ; ils étaient un peu plus blonds que les hommes, qui marquaient beaucoup d’attention et de tendresse pour eux ; ils les levaient fréquemment en l’air pour qu’ils vissent mieux le vaisseau. Je donnai à ces enfans des colliers et des bracelets de verroterie, qui leur firent beaucoup de plaisir. Pendant que ces Indiens restaient avec nous, les uns sur le vaisseau, les autres dans leurs pirogues, la chaloupe partit pour aller faire du bois et de l’eau. Les Indiens qui étaient dans les pirogues tinrent les yeux fixés sur la chaloupe pendant qu’on l’équipait. Dès qu’elle s’éloigna, ils appelèrent par de grands cris ceux qui étaient à bord ; ceux-ci eurent aussitôt l’air très-alarmés, sautèrent à la hâte dans leurs pirogues, après avoir fait descendre les enfans, et s’éloignèrent sans proférer une parole. Nous ne pouvions deviner la cause de l’émotion soudaine de ces Indiens, qui suivirent la chaloupe en poussant de grands cris, et en donnant des marques extraordinaires de trouble et d’effroi. La chaloupe, qui marchait plus vite qu’eux, les devança à la côte, où mes matelots aperçurent des femmes qui ramassaient des moules au milieu des rochers. Leur vue expliqua aussitôt le mystère. Les pauvres Indiens craignaient que les étrangers ne voulussent attenter, soit par force, soit par séduction, aux droits des maris de ces femmes, droits dont ils paraissaient plus