Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/168

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ce qu’on y fait cuire ; ils en tirent les alimens, qui sont tendres, pleins de suc, et, suivant moi, beaucoup meilleurs que si on les avait apprêtés de toute autre manière : le jus des fruits et l’eau salée forment toutes leurs sauces. Ils n’ont pas d’autres couteaux que des coquilles avec lesquelles ils découpent très-adroitement, et dont ils se servent toujours.

» Notre canonnier, pendant la tenue du marché, avait coutume de dîner à terre ; il n’est pas possible de décrire l’étonnement et la surprise qu’ils témoignèrent lorsqu’ils virent qu’il faisait cuire son cochon et sa volaille dans une marmite. J’ai observé plus haut qu’ils n’ont point de vase ou poterie qui aille au feu, et qu’ils n’ont aucune idée de l’eau chaude et de ses effets. Dès que le vieillard fut en possession du pot de fer que nous lui avions donné, lui et ses amis y firent bouillir leurs alimens ; la reine, et plusieurs des chefs qui avaient reçu de nous des marmites s’en servaient constamment ; et les Taïtiens allaient en foule voir cet ustensile, comme la populace va contempler un spectacle de monstres et de marionnettes de nos foires d’Europe. Il nous parut qu’ils n’ont d’autre boisson que l’eau, et qu’ils ignorent heureusement l’art de faire fermenter le suc des végétaux pour en tirer une liqueur enivrante. Nous déjà dit qu’il y a dans l’île des cannes à sucre ; mais à ce qu’il nous sembla, ils n’en font d’autre usage que de les mâcher, et même cela ne leur arrive pas habituellement ;