Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/251

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la bonté de votre cœur, dont j’avais tant de preuves certaines.

» J’avais déjà reçu ici Poutavéry en 1768 : je l’y avais accueilli à la ville et à la campagne ; pendant tout son séjour dans cette île il avait eu le couvert chez moi : je lui ai rendu tous les services qui ont dépendu de moi ; il est parti d’ici mon ami, et il revenait dans cette île plein de sentimens d’amitié et de reconnaissance pour son Polary, car c’est ainsi qu’il me nomme. Vous ne sauriez croire à quel point cet homme naturel porte la mémoire des bienfaits et le sentiment de la reconnaissance.

» Pendant toute la traversée, sachant qu’il revenait à l’Île de France, il a toujours parlé à tous les officiers du vaisseau du plaisir qu’il aurait de revoir son ami Polary. Arrivé ici, on a voulu le conduire au gouvernement ; il ne l’a pas voulu : tout en mettant le pied à terre, il a couru par le chemin le plus court droit à ma maison ; il m’a fait toutes sortes de caresses à sa façon, et m’a tout de suite raconté tous les petits services que je lui avais rendus. Quand il a été question de se mettre à table, il a aussitôt montré son ancienne place à côté de moi, et a voulu la reprendre.

» Vous voyez que vous ne pouviez pas mieux vous adresser pour procurer à cet honnête homme naturel les secours dont il aura besoin ici, et le moyen de retourner commodément et convenablement dans sa patrie, l’île de Taïti. Je serais bien fâché qu’un autre que moi eût