Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/332

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pas sur ses gardes contre la trahison ; cependant, l’île qu’il voyait à une très-petite distance présentait un aspect si riant ; les malades, dont le nombre croissait tous les jours dans une proportion effrayante, avaient un besoin si pressant de rafraîchissemens, qu’il se détermina à tenter une descente. L’iole fut mise à la mer, et Labé s’y embarqua avec un détachement de soldats bien armés. En même temps le vaisseau fit route pour protéger ce canot, et le soutenir par l’artillerie, s’il était attaqué.

À peine était-il éloigné de deux portées de fusil que les pirogues se réunirent en peloton comme pour tenir conseil ; et quatre s’étant détachées à la rencontre du canot, l’entourèrent. Les insulaires ajustaient déjà les flèches à leurs arcs ; mais Labé, qui avait appris à ses dépens, au port Praslin, que chez ces peuples l’effet suit de près la menace, crut devoir prévenir leur intention meurtrière, et ordonna de faire feu sur eux. Le vaisseau, d’où l’on avait suivi des yeux tous les mouvemens des pirogues, tira deux coups de canon à boulet sur celles qui étaient les plus éloignées. Toutes s’enfuirent à la hâte vers la terre, et l’iole revint à bord.

Cependant les sauvages furent bientôt remis de leur premier effroi, et à six heures du soir on vit une armée de pirogues s’avancer en bon ordre vers le vaisseau. Surville, qui désespéra de pouvoir effectuer son projet de débarquement, et qui voulut, en supposant de bonne heure à l’attaque, diminuer pour ces braves insulaires