Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/341

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La tempête avait enlevé un des canots de Surville : l’ayant vu échoué sur le rivage de l’anse du Refuge, il l’envoya chercher. Les insulaires plus alertes s’en emparèrent et le cachèrent si bien, que l’on ne trouva que l’amarre. On soupçonna les insulaires de l’avoir coulé dans une petite rivière que l’on remonta et que l’on descendit à plusieurs reprises ; mais toutes les perquisitions furent inutiles. Surville, transporté de fureur, résolut de se venger d’une manière éclatante de l’enlèvement de son canot. Il fit signe à quelques Indiens qui étaient auprès de leurs pirogues de s’approcher. Un seul accourut, fut arrêté à l’instant, et conduit à bord : les autres, moins confians, prirent aussitôt la fuite. On s’empara d’une pirogue, on brûla les autres ; on mit le feu aux maisons, et l’on s’embarqua. Après avoir ainsi porté la désolation et l’effroi dans ces contrées, Surville conçut qu’il lui serait impossible d’avoir la moindre communication avec les habitans ; il quitta donc la Nouvelle-Zélande le 1er. janvier 1770, sans prévoir que l’injuste châtiment qu’il venait d’infliger aux insulaires aurait les suites les plus funestes pour les Européens qui auraient le malheur d’aborder sur ces plages lointaines.

L’insulaire qui avait été arrêté était Naginoui, ce chef humain, bon et sensible, qui avait accueilli si généreusement les malades dans sa maison, et qui, après les bienfaits dont il les avait comblés, ne devait pas s’attendre au trai-