Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 26.djvu/194

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fait, et d’une physionomie très-ouverte, resta seul dans sa pirogue, sans donner le moindre indice d’étonnement ou de crainte ; mais avec un air de gaieté il jeta des regards de dédain sur ses compatriotes effrayés. Mais voyant ensuite que notre bravade n’avait eu pour eux aucune suite funeste, ils causèrent d’un ton très-haut, et ils parurent rire de leur propre épouvante.

» J’observai un autre trait de courage dans un vieillard qui se trouvait autour d’une bouée, qu’il voulait probablement enlever : quoiqu’il eût été blessé par un premier coup de fusil, il ne désempara point, et il garda son poste à la seconde et à la troisième décharge ; et même après avoir ainsi enduré notre feu, il eut assez de générosité et de hardiesse pour venir nous offrir son amitié et nous présenter un coco.

» Pendant tout ce temps, un vieillard très-paisible fit plusieurs voyages du rivage au vaisseau, apportant chaque fois des cocos ou un igname, et prenant en échange tout ce qu’on voulait lui donner. Un second, au moment qu’on tira le canon, était sur le passavant ; on ne put le rassurer assez pour l’engager à rester. Vers le soir, après avoir amarré le vaisseau, le capitaine alla avec un fort détachement descendre à l’entrée de la baie. Les Indiens ne s’opposèrent pas à notre descente : ils formaient deux corps, l’un à notre droite, et l’autre à la gauche ; tous étaient armés de massues, de dards, de lances, de frondes et de pierres,