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sérables, qu’ils ne voulaient ou ne pouvaient point se préserver de la rigueur du temps : je ne puis pas imaginer un être plus misérable que celui qui est privé de raison au point d’être incapable de combiner de pareilles idées.

» Ces sauvages, en mangeant la chair de phoque pourie, préféraient la partie huileuse, et la seule attention qu’ils eurent pour les matelots, fut de leur en offrir. Tous les peuples des hautes latitudes aiment cette huile par instinct ; on dit qu’elle réchauffe leur corps contre la rigueur du froid. Les vêtemens, les armes, les ornemens, les ustensiles, et tout le corps de ces sauvages, exhalaient une puanteur si insupportable, que nous ne pouvions demeurer long-temps parmi eux : les yeux fermés nous les sentions à une distance considérable. On aura peine à le croire, et cependant c’est un fait, ces mauvaises exhalaisons réprimèrent tellement les désirs des matelots les plus sales et les plus déterminés, qu’ils n’essayèrent pas de contracter des liaisons avec les femmes.

» Nous n’avons remarqué aucune espèce de subordination parmi ces sauvages : leur vie approche plus de celle des brutes que celle d’aucune autre nation. Il est très-probable que ce sont de malheureux proscrits de quelque tribu voisine qui mène une vie plus douce ; et que, réduits à vivre dans cette partie sauvage de la Terre du Feu, ils ont insensiblement perdu toutes leurs idées, excepté celle que re-