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les Taïtiens qui le virent le regardaient comme un prodige : ils lui offrirent les mets les plus exquis, plusieurs vêtemens complets, et les nymphes de l’île lui prodiguèrent leurs faveurs. Il aimait le plaisir comme tous les enfans de la nature : privé de femmes pendant long-temps, et ayant pris peut-être du goût pour la débauche en fréquentant les matelots, il ne manqua pas de profiter de l’occasion, et ne revint plus guère à bord. Ce qui lui donnait le plus de goût pour rester à terre, c’est qu’il pouvait aisément y satisfaire tous ses désirs. D’ailleurs le vaisseau, sous un climat chaud, est un asile peu commode pendant la nuit. Il y aurait été enfermé dans une chambre étroite et puante, au lieu qu’à terre il respirait un air pur, embaumé de parfums délicieux, et rafraîchi par une brise de terre exactement pareille au zéphyr dont parlent tant les poëtes. Enfin l’heureux Oedidi goûta des jouissances dont nous sommes incapables de sentir le charme.

» Dès le premier soir, les matelots appelèrent des femmes à bord, et les excès de la nuit furent incroyables.

» Les femmes qui avaient passé la première nuit à bord revinrent la nuit suivante accompagnées de plusieurs autres ; de sorte que chaque matelot eut la sienne. La nuit fut très-belle et la lune charmante ; et comme nous célébrions la fête de saint George, patron de la Grande-Bretagne, ils mêlèrent les plai-