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leurs formes, qu’ils paraissent être d’une race différente. Leurs estomacs, d’une dimension prodigieuse, exigent une quantité extraordinaire d’alimens. Les héros du siège de Troie sont, comme les chefs de Taïti, fameux par la quantité d’alimens qu’ils consommaient, et il paraît que les Grecs n’aimaient pas moins le porc que les Taïtiens d’aujourd’hui. On observe la même simplicité de mœurs dans les deux nations, et leur caractère est également hospitalier, affectueux et humain. Il existe même de la ressemblance dans leur constitution politique. Les chefs des districts de Taïti sont des princes puissans, qui n’ont pas plus de respect pour O-tou que les Grecs n’en avaient pour Agarnemnon ; et on parle si peu du bas peuple dans l’Iliade, qu’on a lieu de supposer qu’il avait aussi peu d’importance que les teouteous du grand Océan. Enfin je pense que la ressemblance pourrait être poussée plus loin ; mais je n’ai voulu que l’indiquer, sans abuser de la patience des lecteurs. Ce que j’ai dit prouve assez que les hommes parvenus au même degré de civilisation se ressemblent les uns les autres plus que nous ne le croyons, même aux deux extrémités du monde. Je serais fâché d’avoir fait ces courtes observations, si elle engageaient un écrivain systématique à trouver une origine commune aux Grecs et aux insulaires du grand Océan. La manie de rapprocher les Égyptiens et les Chinois, par exemple, a excité tant de disputes, que les vrais savans désirent qu’elle