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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 29.djvu/50

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rant les victimes humaines ils lui ôtaient les moyens de s’en nourrir. Ils me répondirent que leur dieu arrivait la nuit sans qu’on l’aperçût ; qu’il se nourrissait de l’âme ou de la partie immatérielle, qui, selon leur doctrine, demeure autour du moraï jusqu’à ce que la putréfaction ait entièrement détruit le corps.

» Il est bien à désirer que ce peuple, aveuglé par la superstition, apprenne à regarder avec horreur ces sacrifices humains dont il régale ses dieux, et qu’il s’en dégoûte comme il s’est dégoûté de l’usage de manger de la chair humaine ; car on est très-fondé à croire que jadis il était cannibale. On nous assura qu’il est indispensable d’arracher l’œil gauche de l’infortuné qu’on sacrifie : le prêtre le présente au roi, ainsi que nous le vîmes ; il l’approche du monarque, à qui il recommande d’ouvrir la bouche ; mais il le retire sans le mettre dans la bouche du prince. Ils appellent cette partie de la cérémonie, manger l’homme, ou régal du chef ; et c’est peut-être un reste des temps où le roi mangeait véritablement le corps de la victime.

» Je n’insisterai pas sur ces détails qui souillent l’imagination. Il est sûr qu’outre les sacrifices humains, ces insulaires, si remplis de bienfaisance et de douceur, ont d’autres coutumes barbares. Ils coupent les mâchoires de ceux de leurs ennemis qu’ils tuent dans les batailles ; ils offrent même en sacrifice à l’éatoua les corps des vaincus. S’ils sortent vainqueurs