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fonde que les caraques mêmes peuvent s’approcher jusqu’au rivage.

Avec quelque soin que la caraque eût été réparée, un nouvel accident fit douter si elle était capable d’achever le voyage. On avait levé une des deux ancres de devers la terre ; mais lorsqu’on voulut lever la seconde, elle se trouva prise dans un gros câble qui était demeuré depuis long-temps au fond de la mer, et qui, la faisant couler à mesure qu’on s’efforçait de la tirer, fit approcher le navire fort près du rivage. Le capitaine, qui s’en aperçut, fit couper aussitôt le câble de l’ancre, et donna ordre qu’on mît à la voile. Malheureusement le vent changea tout à coup, et, venant de la mer, il poussa la caraque avec tant de violence, qu’elle demeura couchée l’espace de cinq heures avec fort peu d’eau. On vit même sortir quelques planches du fond : chacun se crut perdu. On ne balança point à décharger les eaux douces qu’on venait de prendre dans l’île, et les marchandises de moindre prix. On fit porter les ancres bien loin en mer, pour tirer le navire à force de bras. Enfin il recommença heureusement à flotter ; mais il faisait beaucoup d’eau, et le capitaine jugeant, après un long travail, qu’on avait besoin de quelqu’un qui sût plonger, promit cent cruzades à celui qui rendrait un si important service. Un des compagnons de Pyrard, ancien charpentier du Forbin, fut le seul qui s’offrit, quoiqu’il doutât lui-même du succès, parce