Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/216

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» François Baratto, qui avait succédé dans cet intervalle au gouvernement général des Indes, parut sensible au plaisir de recevoir une lettre et des présens par lesquels il se flatta de faire avantageusement sa cour au roi de Portugal. « J’estime ce que vous m’apportez, me dit-il en les recevant, plus que l’emploi dont je suis revêtu ; et j’espère que ce présent et cette lettre serviront à me garantir de l’écueil de Lisbonne, où la plupart de ceux qui ont gouverné les Indes ne vont mettre pied à terre que pour se perdre. »

» Dans la reconnaissance qu’il eut pour ce service, il me fit des offres que d’autres vues ne me permirent pas d’accepter. Ma fortune, quoique fort éloignée de l’opulence, commençait à borner mes désirs ; et l’ennui du travail s’étant fortifié dans mon cœur à mesure que j’avais acquis la force d’y renoncer, je n’avais plus d’impatience que pour aller jouir dans ma patrie d’un repos que j’avais acheté si cher. Cependant je profitai de la disposition du vice-roi pour vérifier devant lui, par des attestations et des actes, combien de fois j’étais tombé dans l’esclavage pour le service du roi ou de la nation, et combien de fois j’avais été dépouillé de mes marchandises. Je m’imaginais qu’avec ces précautions les récompenses ne pouvaient me manquer à Lisbonne. Don François Baratto joignit à toutes ces pièces une lettre au roi, dans laquelle il rendait un témoignage fort honorable de ma conduite et de