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riété sont incroyables au Malabar, y passent pour des animaux divins, auxquels on élève des statues et des temples. Quelque ravage qu’ils y causent, ce serait un crime capital d’en tuer un sur les terres d’un prince gentou. Dellon parle de plusieurs fêtes instituées à leur honneur, qui se célèbrent avec beaucoup de pompe et de cérémonies.

Ce voyageur avait douté, dit-il, de ce qu’il avait entendu raconter, et de ce qu’il avait lu sur les couleuvres du Malabar ; mais il s’en convainquit par ses yeux. On en distingue plusieurs espèces, qui diffèrent en grosseur, en couleur, en figure, et surtout en malignité. Les unes sont vertes et de la grosseur du doigt, mais de cinq à six pieds de longueur. Elles sont d’autant plus dangereuses, que, se cachant dans les buissons, entre les feuilles, leur couleur ne permet pas de les apercevoir. Elles ne fuient point, si l’on ne fait beaucoup de bruit : au contraire elles s’élancent sur les passans, dont elles attaquent presque toujours les yeux, le nez ou les oreilles. Ce n’est point par leurs morsures qu’elles empoisonnent, mais en répandant un venin subtil, dont l’effet est si funeste, qu’il cause la mort en moins d’une heure. Comme leur rencontre n’est que trop fréquente, l’usage dans les chemins étroits est de se faire précéder d’un esclave, qui frappe de part et d’autre pour les écarter. Un Indien malabare, qui servait quelquefois Dellon en qualité d’interprète, allant un jour au bourg