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marchand chinois qui redoutait l’approche du typhon ; mais, tandis qu’il passait à la portée de la voix, nous entendîmes crier distinctement dans notre langue : Seigneur Dieu, miséricorde ! Ce cri, répété plusieurs fois, nous fit juger qu’il venait de quelques malheureux esclaves de notre nation. Faria, qui pouvait se faire entendre des matelots chinois, leur ordonna d’amener leurs voiles : ils passèrent sans lui répondre ; et, jetant l’ancre un quart de lieue plus loin, ils commencèrent alors à jouer du tambour et faire briller leurs cimeterres. Quoique ces bravades semblassent marquer du courage et de la confiance dans quelques secours que nous ignorions, Faria dépêcha vers eux une barque bien équipée : elle revint bientôt avec un grand nombre de blessés qui n’avaient pu se défendre contre une nuée de dards et de pierres qu’on leur avaient lancés du bord. Ce spectacle irrita si vivement Faria, que, faisant lever aussitôt les ancres, il s’approcha de l’ennemi jusqu’à la portée de l’arquebuse. À cette distance, il le salua de trente-six pièces de canon, entre lesquelles il y en avait quelques-unes de batterie qui tiraient des balles de fonte. Toute la résolution des corsaires ne les empêcha point de couper leurs câbles pour se faire échouer sur la rive ; mais Faria n’eut pas plus tôt reconnu leur dessein, qu’il les aborda avec furie. Le combat devint terrible. Ils étaient en si grand nombre, que pendant plus d’une demi-heure les forces se soutinrent de