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le cap de Comorin, donna occasion à l’auteur de visiter la fameuse côte de la Pêcherie, qui tire ce nom de l’abondance des perles qu’on y pèche. « Les habitans connaissent, dit-il, dans quelle saison ils doivent chercher ces belles larmes du ciel qui se trouvent endurcies dans les huîtres. Alors les pêcheurs s’avancent en mer dans leurs barques : l’un plonge, attaché sous les aisselles avec une corde, la bouche remplie d’huile et un sac au cou : il ramasse les huîtres qu’il trouve au fond ; et lorsqu’il n’a plus la force de retenir son haleine, il emploie quelques signes pour se faire retirer. Ces pêcheurs sont si bons chrétiens, qu’après leur pêche ils viennent ordinairement à l’église, où ils mettent souvent de grosses poignées de perles sur l’autel. On fit voir au père de Rhodes une chasuble qui en était entièrement couverte, et qui était estimée deux cent mille écus dans le pays. Qu’eût-elle valu, dit-il, en Europe ? »

La principale place de cette côte est Totocorin : on y trouve les plus belles perles de l’Orient. Les Portugais y avaient une citadelle, et les jésuites un fort beau collége. Il était arrivé, par des malheurs que de Rhodes ignore, qu’on avait ôté cette maison à sa compagnie. « Les jésuites, dit-il, s’étant retirés, on dit que les perles et les huîtres disparurent dans cet endroit de la côte ; mais aussitôt que le roi de Portugal eut rappelé ces zélés missionnaires, on y vit revenir les perles, comme si le ciel eût voulu remarquer que, lorsque les pêcheurs